Israël, le retour … Yael Bensimhoun

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Israël, le retour … Yael Bensimhoun
La frappe israélienne à Doha contre la direction du Hamas m’a confortée dans une idée qui s’impose depuis quelque temps : Israël est redevenu imprévisible pour ses ennemis et incontrôlable pour ceux qui prétendaient le tenir en laisse.
Depuis sa création, Israël a survécu en surprenant. En 1948, alors qu’on le croyait condamné d’avance, il a triomphé. En 1967, il a frappé le premier et bouleversé l’équilibre régional en six jours. En 1973, il a transformé une attaque surprise en victoire militaire et diplomatique.
Et ce n’étaient pas seulement les guerres fondatrices : pendant les grandes années d’Israël, les opérations menées par le Mossad, le Shin Bet et les unités spéciales ont ajouté à ce sentiment que nul n’était intouchable, que les ennemis pouvaient être frappés partout, à tout moment. L’imprévisibilité se déclinait alors aussi bien sur les champs de bataille que dans l’ombre des services secrets. Elle était sa marque de fabrique, l’arme psychologique qui garantissait sa survie.
Puis, au fil des décennies, un autre Israël est apparu : celui qui, sous les injonctions internationales, les condamnations et les pressions de l’ONU, devait accepter cessez-le-feu sur cessez-le-feu, s’interdire d’aller jusqu’au bout de ses victoires, et composer avec les desiderata des puissances étrangères. Cet Israël-là a payé le prix fort : attentats à répétition, intifadas, et enfin l’horreur du 7 octobre.
Depuis ce jour, quelque chose a basculé. Israël est redevenu « dingue ». Il ne joue plus selon les règles écrites ailleurs. Les frappes en Syrie, au Liban, en Iran et maintenant au Qatar montrent que plus aucun sanctuaire n’existe pour ses ennemis. Israël ne prévient plus forcément ses alliés, ou du moins pas toujours au moment attendu, ce qui donne cette impression d’imprévisibilité stratégique. En réalité, ce qui paraît contradictoire, accepter un accord de cessez-le-feu et frapper en même temps, est cohérent si l’on comprend que l’imprévisibilité est redevenue une arme stratégique israélienne.
Le Hamas, lui, avait bâti toute sa stratégie sur un postulat inverse : Israël était devenu prévisible, contraint par la communauté internationale, prisonnier de ses propres limites. C’est ainsi qu’il a cru pouvoir jouer avec nous, organiser le massacre du 7 octobre et résister ensuite en misant sur nos freins habituels. Mais face à un Israël redevenu imprévisible, il se retrouve aujourd’hui déboussolé, incapable de savoir à qui il a réellement affaire.
Cela renoue avec l’esprit des guerres fondatrices, mais aussi avec les heures glorieuses des opérations clandestines, où l’effet de surprise et l’indépendance militaire donnaient à Israël un avantage décisif. La récente frappe de Doha en est l’exemple éclatant : une opération militarisée qui montre la priorisation du démantèlement du leadership ennemi sur toute solution diplomatique.
Derrière ce choix, Israël adresse un double message : aux États-Unis qu’il suit leurs efforts diplomatiques, et au Hamas que même en pleine négociation, aucun de ses dirigeants n’est à l’abri. Les capitales occidentales s’en offusquent, les régimes voisins se sentent déstabilisés et l’ONU proteste, mais le message demeure limpide : l’époque où Israël pliait sous la pression extérieure semble révolue. Désormais, il reprend son histoire là où elle avait commencé : un petit pays que nul ne peut dompter, qui surprend toujours, et qui fait de son imprévisibilité retrouvée la garantie de sa survie.
𝗬𝗮𝗲𝗹 𝗕𝗲𝗻𝘀𝗶𝗺𝗵𝗼𝘂𝗻

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